Bon, sans blague et sans autres détours, je vais reprendre mon récit que j'ai sadiquement interrompu, vous laissant haletants comme ... Comme moi après le cours samedi, probablement.
Donc, je selle Grand Machin gris fort peu aimable au box, toutes bananes en arrières, avec la Butet obstacle que Nico me prête pour l'occasion. Mon derrière s'en rappelle avec délices, on est vachement bien là dedans!
Et puis, tous en selle dans le manège, on va monter dans la carrière du club d'à côté (enfin c'est le même club mais pas la même écurie). On en profite pour faire un petit trotting dans le bois de Boulogne, c'est très agréable, il fait beau, assez chaud, les piafs chantent, Marvel secoue la tête. On m'a prévenu : "il est sage en manège, dès qu'on va dehors il est joyeux". Hm. Ouais, pour l'instant, il secoue la tête quoi. Pas de quoi fouetter un welsh cob.
On arrive sur la carrière, détente succinte, les bourrins sont déjà échauffés. Je fais connaissance avec le gris, qui secoue la tête au galop. "Lève la main intérieure, baisse la main extérieure" braille Mister T. 'fectivement ça le calme, bon. On détend ensuite sur les barres, un petit (60 cm) vertical au trot aux deux mains, puis au galop, puis un petit oxer, et roule, on enchaîne!
En un, arrivée à main gauche sur l'oxer bleu et blanc de la détente, puis boucle à main droite, vertical avec un sous-bassement aux couleurs de la Gay Pride (sans plaisanter)
- Jacques Audiard vient de remporter je sais pas quoi pour "le Prophète" -
en trois, une ligne d'une demi-douzaine de foulées, un oxer avec sous-bassement "poker", demi-tour à main gauche pour revenir sur l'arc-en-ciel, virage à main gauche rapide pour un petit vertical, puis grande boucle à gauche pour finir sur l'oxer n°1.
Pas sorcier, présenté comme ça.
Les compères s'élancent les uns après les autres, l'un des chevaux (celui du mono monté par une des cavalières du groupe) s'amuse à piler plusieurs fois sur l'obstacle gay, pas méchamment mais juste pour emmerder le monde, jusqu'à ce que son cavalier habituel le reprenne
-Mikael Hanneke obtient la Palme d'Or pour le "Ruban Blanc" -
et lui dise d'arrêter ses conneries ; ce qu'il s'empresse de faire après un test "ah bon t'es sûr?" Une fessée, et ça repart. On dirait une saloperie de gros shetland, pauvre cavalière, elle en peste à qui mieux mieux.
Moi pendant ce temps-là, je crève de soif. Puis vient mon tour. Je trotte un peu pour échauffer la bête, qui part en freestyle deux fois au même endroit. C'est qu'il y a Godzilla derrière le buisson, vous comprenez (des enfants qui jouent...) Et puis bon, moi pauvre cavalière, j'ai pas conscience que les enfants ça mange les grands gris pourvus d'en tout et pour tout deux neurones. Nan mais où va le monde, je vous jure!
Bon, fini les conneries, je me rétablis sur mes deux étriers, et je me lance. Premier oxer, pas mal, j'ai du mal à reprendre, d'après Mister T. j'en demande pas assez, je suis trop gentille. Ouais je sais, je suis une bonne poire. Le gris balance la tête, merci la martingale, on arrive sur l'obstacle Gay Pride qui ne nous pose pas de problème. Euuuuuuh attends je dois faire quoi là? J'ai oublié. Meeeerde l'oxer-poker! Droite-gauche-droite-gauche j'hésite et Marvel passe à côté. Pas grave, Keval, c'est ma faute. On reprend la ligne. Je me concentre à mort sur l'oxer-poker, le vertical passe bien, et je dois manquer de conviction au dernier moment en restant scotchée sur l'oxer, Marvel re-dérobe, je perds un étrier, et là c'est un grand moment.
J'ai purement et simplement sauté de cheval.
Ouais.
J'ai quitté le navire, abandonné le bateau sans me préoccuper des femmes et des enfants d'abord, qu'ils aillent crever, moi je sauve ma peau face au chandelier qui pourrait éventuellement m'en vouloir.
En fait, j'ai perdu un étrier, j'ai pas eu la force de lutter, alors j'ai tout lâché et sauté à terre. Poney comprend pas et court rejoindre les potos. Moi je me relève dignement (je suis tombée debout et ai amorti sur les genoux), m'époussette dignement les genoux, et repars dignement récupérer le Gris. Evidemment ça charrie, je suis bonne pour une bouteille de pif la prochaine fois!
Je remonte, ré-enchaîne la ligne sans trop de problème, passe à côté de l'avant-dernier vertical qui arrivait un peu trop vite à mon goût, me fais re-trimballer allègrement du côté de chez Godzilla, remets en ordre sur une volte avant d'aller franchir, l'air de rien, le dernier oxer.
Sur ces péripéties le cours s'achève, on rentre les bourricots, Marvel flâne et compte les oiseaux dans le bois, moi je suis contente et je me marre.
Conclusion : rien ne sert de courir, suffit de savoir sauter à temps.